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La vie fulgurante
La vie fulgurante

La vie fulgurante de Marianne van Hirtum est un livret plein de sensibilité, publié par l’Arbre de Diane. Des vers qui volent entre nature envoûtante et solitude grise.

Temps de lecture : 3 min

En me baladant sur les sites des maisons d’éditions, j’étais tombée sur L’Arbre de Diane, une maison d’édition qui met à l’honneur la poésie et les femmes, qu’elles soient rêveuses ou scientifiques, parfois les deux à la fois.

La couverture de La vie fulgurante m’avait retenue sur une des pages de présentation d’auteures : je ne sais pas ce qui, du rose ou du visage goguenard et mélancolique, clope au bec, m’a fait l’effet de vouloir m’attarder un peu. Marianne van Hirtum, belge, années 30, surréalisme, psychiatre. Quelques mots que l'œil égrène dans une lecture en diagonale.

Je me dis que je m’offrirais bien ce recueil, mais une personne a été plus rapide que moi et me l’a glissé entre deux auréoles de lait sur la table d’un café.

Dans les vers de Van Hirtum, je découvre une extrême liberté, celle qui ne redoute aucune limite. On se vautre contre des vents, emportés dans une nature animée, lyrique et terrifiante, plus vive que les corps que l’on croise ; eux sont absents, gris. Elle nous décrit ce qui semble être son environnement immédiat : près du sanatorium de Beau Vallon, un hôpital psychiatrique ‒ « des masques aux yeux absents ».

La vie, pas une, mais « La », ce déterminant qui singularise l’existence, quoiqu’elle soit, quoiqu’elle fût.

Fugace, elle passe sans le temps d’un regrets : dans l’enfermement, celui des lieux ou des étiquettes ‒ les malades ‒, celui d’une forme de réclusion ‒ le sanatorium ‒ dans un espace oublié où toutes les limites du rêve et de l'onirisme s’effacent, on s’échappe par l’imaginaire.

Son chez-soi à Paris était, parait-il, rempli d’objets étranges, funéraires, ainsi que de reptiles. Elle ne se définissait pas comme une artiste, ne voulait pas entrer dans des cases ou endosser des postures ; rester libre, en somme, d’écrire par nécessité. D’ailleurs, elle écrivait en cachette ; je l’ai lu au moment où je me demandais à qui elle s’adressait exactement. La poésie a parfois quelque chose d’ambigu en termes de finalité, c’est un tel murmure intime qu’on se sent chanceux de tomber dessus, comme par un heureux hasard. Je n’ai pas tout compris, je ne pense pas que ce soit grave, au contraire, tant mieux : on peut faire le tour d’un même vers et d’un même recueil plusieurs fois, à différents moments de la journée et de notre vie, et ça ne voudra jamais dire la même chose. Elle s’est envolée avec son intention, nous laissant en cadeau des mots qu’on peut s’approprier, un certain regard, éclair, sur les choses de la vie, mêmes infimes.

Mardi 24 juin 2025
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